Communiqué de presse des Femmes socialistes du 3 février 2022
Cette année, la situation helvétique en matière de violences domestiques, sexuelles et sexistes est examinée par un groupe d’expert-es du Conseil de l’Europe. Dans ce cadre, deux membres du Groupe d’expert-es sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (GREVIO) seront présent-es en Suisse ces prochains jours. Cette visite est particulièrement intéressante en ce qui concerne l’actuelle révision du droit pénal en matière sexuelle. Dans ce contexte, ce sont aussi les déficits importants dans la lutte contre les violences qui pourront être mis en lumière.
La Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (Convention d’Istanbul) est entrée en vigueur en Suisse il y a déjà presque quatre ans. Toutefois, sa mise en œuvre piétine – de nombreuses mesures ne sont pas encore appliquées ou ne le sont qu’insuffisamment. Le GREVIO est chargé d’examiner la situation et un rapport sur la Suisse devrait être publié cette année.
Pour les Femmes socialistes, le constat est toutefois déjà limpide : « durant ces quatre années, trop peu a été fait. Il est maintenant urgent que le Conseil fédéral donne la priorité aux enjeux en lien avec les violences basées sur le genre et agisse plus rapidement, plus résolument et plus efficacement », déclare la conseillère nationale (BE) et co-présidente des Femmes socialistes suisses Tamara Funiciello.
Un manque de moyens comme obstacle majeur
Pour les organisations spécialisées et les personnes actives dans la lutte contre les violences, le manque massif de moyens financiers constitue un obstacle majeur. Selon l’article 8 de la Convention d’Istanbul, l’État doit mettre à disposition des moyens financiers et humains adéquats. Pourtant, les ressources financières nécessaires à la lutte font largement défaut. C’est en tout cas ce qu’indiquent les offres d’aide toujours insuffisante dédiées aux personnes subissant des discriminations, le manque de moyens dans les centres de consultation pour les victimes et les personnes ayant commis des actes de violence, mais aussi les rapports des refuges qui sont contraints de refuser certaines personnes victimes de violence. Ces lacunes ont d’ailleurs également été constatées dans le rapport alternatif du réseau de la Convention d’Istanbul de juin 2021.
« Si la Confédération et les cantons prennent au sérieux la lutte contre la violence, ils doivent enfin débloquer les fonds nécessaires, sinon la ratification de la Convention d’Istanbul restera une promesse vide », souligne Martine Docourt, co-présidente des Femmes socialistes suisses, en relevant l’importance des ressources financières pour mener la lutte contre les violences.
Sensibiliser les forces de l’ordre
Comme l’a récemment confirmé une enquête de la police cantonale bernoise, il existe un défaut majeur supplémentaire dans la manière dont les autorités de poursuite pénale traitent les victimes de violences sexuelles. Les victimes qui se sont exprimées dans les médias ont fait état d’une prise en charge traumatisante et inhumaine, aussi bien lors des auditions par la police que par le ministère public. Face à ce constat, les Femmes socialistes demandent que les autorités de poursuite pénale soient obligatoirement formées au contact avec les victimes de violence et que cette dimension fasse partie intégrante de leur formation. Cette demande correspond à une exigence de la Convention d’Istanbul (article 15). Aussi, il est urgent de créer des centres de crise spécialisés et dédiés aux premiers soins médicaux dans toute la Suisse. Comme le prévoit l’article 25 de la Convention d’Istanbul, il est également nécessaire d’assurer une prise en charge relative à la conservation des preuves de violences subies par les victimes, à l’image des dispositifs déjà mis en œuvre à Berne ou encore à Lausanne.
Vers une nouvelle définition du viol : seul un oui est un oui !
La Convention d’Istanbul a également pour rôle de nous orienter dans la révision du droit pénal en matière sexuelle. L’article 36 exige que l’absence de consentement soit le critère déterminant dans la définition des agressions sexuelles et du viol. La Commission des affaires juridiques du Conseil des États présentera le 17 février son projet de loi sur la révision du droit pénal en matière sexuelle.
« Les plus de 10 000 réponses comptabilisées lors de la consultation ont envoyé un signal clair », rappelle Tamara Funiciello. « Nous demandons une nouvelle définition du viol selon le principe « seul un oui est un oui » et nous nous battrons jusqu’à ce que notre droit à l’autodétermination soit inscrit dans la loi. »