Plus un accusé réagit de manière forte à la critique, moins sa conscience est légère. La direction de Credit Suisse a répondu nerveusement à ma demande du week-end. En effet, j’avais proposé au groupe bancaire la démission de ses managers qui plaideront probablement coupables dans les affaires de fraudes fiscales aux Etats-Unis. Selon moi, un tel départ permettrait à Credit Suisse de repartir sur des bases plus saines. Hier, le géant bancaire a utilisé un journal à sensation pour raconter sa version des faits : au menu, de belles histoires à propos de l’entreprise et des fraudeurs fiscaux américains. De plus, Credit Suisse ne manque pas de m’épingler en m’accusant de « falsification de l’histoire ».
L’affaire est trop grave pour tomber dans une foire d’empoigne ; restons-en aux faits :
A la fin février, les managers de Credit Suisse ont assuré – sous serment – devant une commission du Sénat américain, qu’ils n’étaient pas au courant de violations systématiques à l’encontre du droit américain. Seul un petit groupe d’employé-e-s aurait agi ainsi, sans que cela soit porté à la connaissance de la direction. Il est pratique de pouvoir ainsi sacrifier les « petits », en expliquant que « cela n’aurait jamais dû être autorisé ». Il paraît évident que les responsables ont échoué en tant que dirigeants ou qu’ils n’ont tout simplement plus voulu assumer le rôle qui est le leur. Désormais, ces mêmes personnes doivent signer des aveux et « plaider coupable ». Ces deux positions ne peuvent être compatibles. Le problème ne peut être résolu qu’avec une démission.
La stratégie de défense de Credit Suisse ressemble à un véritable fiasco. Il n’est pas possible d’édulcorer la situation, d’ignorer le droit suisse et de passer l’éponge. Il paraît donc logique que les managers de Credit Suisse avouent leurs méfaits et ne cherchent pas d’autres coupables. Preuve s’il en est que la patience de Washington a atteint ses limites, la facture dont devra s’acquitter Credit Suisse sera vraisemblablement bien supérieure à celle d’UBS il y a quelques années. UBS avait d’ailleurs été confrontée à l’échec de sa stratégie et ses dirigeants avaient dû en assumer les conséquences.
La direction de Credit Suisse prétend désormais qu’elle n’aurait pas eu la possibilité de se placer sous la protection du traité d’entraide administrative sur UBS et rejette donc la critique du Parti socialiste. Premièrement, cette déclaration est un véritable numéro de prestidigitateur ; deuxièmement, il est tout simplement impossible de prouver ces dires. Il n’est tout d’abord absolument pas vérifiable que Credit Suisse aurait cherché à participer au traité d’entraide administrative, comme les principaux intéressés le suggèrent pourtant. Au contraire, nous avions déjà souligné à l’époque à quel point les intentions de faire table rase étaient différentes entre UBS et Credit Suisse.
Credit Suisse est une banque de premier ordre pour la place financière suisse et l’ensemble de l’économie nationale. La bonne santé de ces dernières devrait être une priorité des dirigeants de cette grande banque. De mon point de vue, il est clair que les trois managers de la banque en question et une partie de leurs collaborateurs ne peuvent faire partie de la solution tant il est vrai qu’ils sont à l’origine du problème.