Impôt fédéral sur les successions : renforcer l’AVS avec une mesure juste et ciblée

La votation sur les forfaits fiscaux à peine terminée, voilà que la droite sonne l’hallali contre l’initiative pour imposer les grosses successions en faveur des cantons et de l’AVS, arguant qu’elle mettrait en danger des emplois, menacerait la classe moyenne et nuirait au « modèle suisse » (comme si le « modèle suisse », c’était la cupidité et la croissance des inégalités). Ces attaques teintées d’idéologie bornée montrent surtout que les adversaires de ce projet équilibré et juste n’ont pas lu le texte qu’ils combattent ou se fichent complètement de ce qu’ils ont lu.

L’impôt sur les successions : un impôt juste

L’impôt sur les successions a aussi de nombreux partisans à droite. En effet, c’est un impôt qui taxe un revenu pour lequel les héritiers n’ont aucun mérite, sauf celui de leur lien de parenté. C’est un revenu obtenu sans effort. Avec le creusement des inégalités et l’émergence d’une classe de super-nantis toujours plus nombreux et toujours plus riches qui n’ont rien créé, ni inventé, mais tout hérité, l’impôt sur les successions est un formidable outil de redistribution des richesses et de réduction des inégalités, surtout s’il est ciblé sur les très grandes fortunes, ce qui est le cas de l’initiative.

Une contribution ciblée sur les très grosses fortunes

L’impôt prévu est ciblé sur les très grandes fortunes (environ 2% des contribuables). Seules les successions dont la valeur fiscale nette dépasse 2 millions de francs seront taxées. Toutes les autres successions seront exonérées d’impôt sur les successions, même dans les cantons qui la pratiquent aujourd’hui. La classe moyenne paiera donc moins d’impôt, en particulier dans le canton de Vaud.

Contrairement à ce que prétendent nos adversaires, les maisons familiales ne seront guère concernées, car seule la valeur nette sera prise en compte. Si beaucoup de contribuables possèdent leur propre maison, très peu d’entre elles ont une valeur fiscale nette de dettes aussi élevée. Et même si tel devait être le cas, l’impôt de 20% ne s’appliquerait qu’à partir du deux millionième et un franc de valeur nette. Enfin, 20% est un taux loin d’être confiscatoire, quand on sait que les contribuables assujettis conservent…80% des sommes héritées dépassant 2 millions de francs… et la totalité des sommes inférieures à ce montant.

Pas de danger sur les transmissions d’entreprises, ni sur les exploitations agricoles

Contrairement à ce que prétendent les opposants à l’initiative, elle ne renchérira pas la transmission d’entreprises ou d’exploitations agricoles. Le texte de l’initiative (art. 129a al. 5 P-Cst.), que les opposants n’ont visiblement pas lu, prévoit justement que le législateur devra prévoir des exceptions pour ces cas. Le texte ne contient certes aucun chiffre sur ce point, mais les initiants ont déclaré à maintes reprises qu’ils sont favorables à des franchises très généreuses (le chiffre de 50 millions de francs a été évoqué). Par ailleurs, tous ceux qui, au Parlement, prétendent défendre les entreprises auront l’occasion de voter des réductions substantielles qui ne mettront pas en danger la transmission de PME ou d’exploitations agricoles. En ce qui me concerne, je m’y engage.

Renforcer l’AVS : tous gagnants !

Deux-tiers des revenus de cet impôt fédéral sur les successions doivent revenir à l’AVS. Or, même si elle est beaucoup plus solide que ne l’ont prédit et ne le prétendent les partis bourgeois et milieux économiques, cette dernière aura besoin d’un financement supplémentaire à moyen terme. Une acceptation de l’initiative lui rapporterait 2 milliards de francs supplémentaires par an. Comme cet argent bénéficierait directement à tous les retraités et futurs retraités, nous serions tous gagnants. Et comme l’impôt sur les successions frappe le plus souvent des personnes déjà âgées, qui sont proches de l’âge de l’AVS ou l’ont déjà atteint, c’est un outil de solidarité intragénérationnelle : ce financement supplémentaire de l’AVS n’est pas à la charge des actifs, mais touche plutôt les retraités aisés. L’initiative renforce donc notre œuvre sociale la plus juste et la plus populaire. En cela, elle renforce le « modèle suisse », dont l’AVS est certainement la meilleure ambassadrice. Elle doit donc être soutenue avec vigueur. 

Interlocuteur-trices sur ce thème

Clément Borgeaud

Clément Borgeaud

Porte-parole & campagnes Suisse latine

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