J’ai donc déposé une initiative parlementaire (20.454 « Lutte contre la pauvreté des enfants ») réclamant la généralisation dans toute la Suisse des prestations complémentaires (PC) familles, actuellement versées seulement dans les cantons de Genève, Vaud, Tessin et Soleure. La Commission de la science, de l’éducation et de la culture du Conseil national a décidé d’y donner suite, en soulignant sa vive préoccupation vis-à-vis du nombre élevé d’enfants en situation de pauvreté en Suisse.
L’examen des chiffres publiés par Caritas fait froid dans le dos : un tiers des 278 000 bénéficiaires de l’aide sociale sont des personnes mineures, dont le taux d’aide sociale, 5,3 %, est supérieur à celui de toutes les autres tranches d’âge. Mon initiative part du principe que les enfants n’ont rien à faire à l’aide sociale et qu’il faut tout faire pour éviter qu’ils en dépendent. Car non seulement l’aide sociale stigmatise, mais elle crée aussi une spirale infernale dont il est très difficile de sortir. La non-obligation de restituer les PC familles réduit nettement la précarité et le stress quotidien des bénéficiaires. L’idée est ancienne, puisque les conseillères nationales Lucrezia Meier-Schatz et Jacqueline Fehr les réclamaient déjà il y a une vingtaine d’années, sur la base du modèle tessinois en vigueur depuis 1996.
Les expériences accumulées en 25 ans montrent que les PC familles sont un instrument très efficace de lutte contre la pauvreté. Au Tessin, les enfants ne sont plus surreprésentés à l’aide sociale et n’engendrent plus un risque de pauvreté. Dans le canton de Soleure, la part des familles à l’aide sociale a diminué de 20 % depuis l’introduction des PC familles en 2010. Dans le canton de Vaud, alors que les familles représentaient 70 % des bénéficiaires de l’aide sociale en 2011, cette part est tombée à 10 % en 2017.
Je propose donc la création d’une loi-cadre fédérale instaurant des PC familles sur le modèle des PC à l’AVS/AI, pour permettre à tous les enfants de participer à la société et de se développer. C’est le meilleur moyen de définir un mode d’application et de garantir des dispositions uniformes, en respectant le principe de subsidiarité. Les cantons doivent être associés à l’élaboration de cette loi, qui doit leur laisser une grande autonomie dans les montants, les modalités et le mode de financement de ces PC familles.