Dans le flyer de votation sur l’AVS consacré à son initiative sur la fiscalité, le PDC calcule la pénalité que subit un couple marié, aujourd’hui et dans le cas le plus flagrant, pour sa rente AVS par rapport à un couple célibataire vivant dans les mêmes conditions. Il arrive à une différence de plus de 1000 francs par mois, en conclut que cette «discrimination doit être abolie» et fait ainsi miroiter aux yeux des rentiers mariés une élévation massive de leur rente.
Ce faisant, le PDC trompe les électrices et les électeurs à double titre:
- Il suggère une discrimination des couples mariés en matière d’AVS qui n’existe pas le moins du monde. Certes, les couples mariés et les couples enregistrés ne sont aujourd’hui pas avantagés dans chaque cas si l’on se réfère à la charge fiscale qui pèse sur chacun des deux conjoints pris individuellement, mais ils le sont si l’on considère qu’ils forment une «communauté économique»: chaque année, ils ont accès à 1,4 milliard de francs de rentes de veuve et à 1,2 milliard de francs de supplément de veuvage (20% ajoutés à la rente de vieillesse). En outre, ils économisent chaque année 200 millions de francs de cotisations AVS si le conjoint n’exerce pas d’activité lucrative. Ce bonus accordé aux personnes mariées atteint ainsi chaque année un montant global de 2,8 milliards de francs – c’est plus que la perte de 2,4 milliards de francs qui résulte, pour les couples mariés, du plafonnement de la double rente (somme des rentes des deux conjoints) à 150% de la rente individuelle maximale. Voilà pourquoi Pirmin Bischof, chef de groupe des conseillers/conseillères aux États du PDC, a lui-même admis qu’il n’y avait dans l’AVS absolument aucune pénalisation du mariage.
- Selon un rapport du Conseil fédéral, le déplafonnement des rentes AVS pour les couples mariés occasionnera en 2018 des coûts pour un montant de 2,4 milliards de francs – ce que personne ne conteste. Dans le cadre des débats sur la réforme des rentes, tous les partis ont bien insisté sur le fait que le principe de la solidarité entre les générations devait être respecté dans toute la mesure du possible. Cela signifie notamment qu’un excédent de dépenses pour une génération devrait être financé en l’espace de cette même génération. La conséquence du déplafonnement exigé par le PDC est claire: l’excédent de dépenses à hauteur de 2,4 milliards de francs – qui d’ici à 2030 s’élèvera à 3 milliards de francs par année – devra être compensé dans le cadre de l’AVS (et sera donc à la charge de l’AVS). Pour environ 1,7 million de bénéficiaires d’une rente AVS en 2018, cela entraîne une baisse annuelle des rentes d’environ 1400 francs pour chaque rentière et chaque rentier. Voilà une chose que les seniors devraient bien avoir à l’esprit avant de voter sur l’initiative du PDC sur la fiscalité! On peut bien sûr objecter que la charge pourrait aussi être répartie seulement entre les couples non mariés (pour ménager les couples mariés). C’est exact, mais cela signifierait que les rentes des personnes célibataires ou veuves devraient chaque année être réduites de près de 3000 francs pour que l’équilibre financier soit maintenu – avec des conséquences graves pour un grand nombre de personnes d’un certain âge vivant seules (et) qui aujourd’hui doivent déjà se contenter du minimum vital.
Les calculs montrent que l’initiative n’a pas fait l’objet d’une réflexion approfondie et qu’elle crée beaucoup plus de problèmes qu’elle n’en résout. Un léger relèvement du plafond de 5% conjugué avec l’augmentation des rentes individuelles de 70 francs, comme cela est proposé dans la solution du Conseil des État sur la réforme des rentes, est un bon moyen de compenser des pertes dans le deuxième pilier et un éventuel relèvement de l’âge de la retraite des femmes. L’initiative du PDC veut décupler ce chiffre: cela est irréaliste et irresponsable. Toute personne qui souhaite défendre une réforme du système des rentes équilibrée et raisonnable votera donc Non à l’initiative du PDC sur la fiscalité.