Non à l’initiative « pour la résurrection du secret bancaire pour la fraude fiscale »

L'initiative populaire « pour la protection de la sphère privée » porte un nom trompeur. Elle aurait dû s'appeler « initiative pour la résurrection du secret bancaire pour la fraude fiscale. » Cette idée, lancée conjointement par le PDC et le PLR, est très mauvaise pour plusieurs raisons. L'une d'entre elles est qu'aujourd’hui, nos banques ne veulent plus protéger les fraudeurs, elles souhaitent être protégées des fraudeurs.
L’initiative populaire « pour la protection de la sphère privée » porte un nom trompeur. Elle aurait dû s’appeler « initiative pour la résurrection du secret bancaire pour la fraude fiscale ». Cette idée, lancée conjointement par le PDC et le PLR, est très mauvaise pour plusieurs raisons. L’une d’entre elles est que, aujourd’hui, nos banques ne veulent plus protéger les fraudeurs, elles souhaitent être protégées des fraudeurs.

L’initiative populaire dont nous avons discuté la teneur la semaine dernière porte un titre erroné (15.057) : elle aurait dû en réalité s’appeler « Initiative pour la résurrection du secret bancaire pour la fraude fiscale ».

Pourquoi ? Parce que cette initiative n’a qu’un seul objectif, celui de retourner à la situation de l’avant 2009, lorsque le secret bancaire protégeait efficacement la fraude et l’évasion fiscale.

C’est une mauvaise idée, et ce pour trois raisons :

  • Premièrement parce que protéger les fraudeurs signifie que les contribuables honnêtes, ici comme à l’étranger, payeront plus d’impôts que nécessaire.
  • Deuxièmement parce les banques ont fait un immense travail pour se libérer de l’argent non déclaré au fisc. D’abord de l’argent étranger, puis maintenant, de l’argent détenu par des Suisses. Rien ne sert de se voiler la face : les banques ne se sont pas engagées complètement volontairement dans ce processus. Mais au nom du groupe socialiste, j’aimerais attester aujourd’hui que des progrès importants ont été faits, et ceci est à l’honneur des banques suisses. Désormais, les banques considèrent que d’héberger des avoirs non déclarés, quelle que soit leur origine, constitue un risque pour leurs affaires. D’ailleurs, sans surprise, l’Association suisse des banquiers considère que cette initiative tout comme son contre-projet sont nuisibles à la crédibilité, la probité et le développement de notre place financière.
  • Troisièmement parce que ce dont les banques ont besoin, c’est de règles du jeu clair : la fraude fiscale n’est pas tolérée, et les fraudeurs ne peuvent pas abuser des banques pour cacher leur argent. Aujourd’hui, les banques ne veulent plus protéger les fraudeurs, les banques souhaitent être protégées des fraudeurs.

Dans notre pays, la sphère privée, garantie par l’article 13 de la Constitution, est relativement bien protégée. Mais, à juste titre, elle ne doit pas permettre de couvrir tous les abus de l’évasion fiscale. Il n’y a pas besoin de changer la constitution. Que les millionnaires et milliardaires de l’UDC souhaitent protéger les fraudeurs au fisc, cela ne m’étonne pas. S’il était suisse, je suis sûr que Donald Trump serait membre du comité d’initiative.

En revanche, ce que j’ai de la peine à comprendre, c’est pourquoi le PLR et le PDC s’efforcent de bricoler un contre-projet dont le seul but est d’éviter une défaite sanglante de l’UDC devant le peuple avec son initiative pour la résurrection.

À l’attention du PDC, j’aime bien rappeler qu’il ne s’agit pas de la résurrection au sens théologique du terme mais bien du rétablissement de pratiques immorales et contre-productives. À l’intention du PLR, j’aimerais rappeler que les banques elles-mêmes craignent comme la peste de retomber dans le fléau de la fraude fiscale. On aurait pu, de la part de ce parti, attendre un minimum de raisonnement dans ce dossier central.

J’ai bien lu les explications des journaux selon lesquelles ce serait la présence de quelques brebis égarées du PLR et du PDC dans le comité d’initiative qui obligeraient ces partis à promouvoir maintenant un contre-projet. Mais franchement, chères et chers collègues, devant le peuple, personne ne s’intéresse de savoir qui était véritablement dans le comité d’initiative.

Répéter les erreurs du passé ? Les banques disent non

La question de fond est de savoir si l’on veut que nos banques et notre place financière se développent sur des bases solides et durables, ou si l’on veut répéter les grossières erreurs du passé. La réponse me paraît évidente : il faut des bases solides et durables, c’est aussi l’avis de la branche.

Rien de plus logique : nos banques sont péniblement sorties de la boue, et elles n’ont pas envie d’y retourner.

Néanmoins, j’aimerais quand même remercier le PLR et le PDC de m’avoir permis de vivre un évènement probablement unique dans ma carrière de président du groupe socialiste de l’assemblée fédérale : être le seul parti gouvernemental à défendre les intérêts à long terme de la place financière et de ses employés. Une fois de plus, vous faites de l’aplaventrisme devant l’UDC au lieu de redresser la tête et de défendre l’intérêt général. C’est déplorable.

Je vous remercie donc de suivre le Conseil fédéral en recommandant le rejet de cette initiative et de renoncer à formuler un contre-projet.

Interlocuteur-trices sur ce thème

Roger Nordmann

Roger Nordmann

Conseiller national VD

Clément Borgeaud

Clément Borgeaud

Porte-parole & campagnes Suisse latine

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