Le Parti socialiste prend très au sérieux l’art. 12 de la Constitution qui dit que « quiconque est dans une situation de détresse et n’est pas en mesure de subvenir à son entretien a le droit d’être aidé et assisté et de recevoir les moyens indispensables pour mener une existence conforme à la dignité humaine ».
Force est de constater pourtant que la pauvreté a été un tabou pendant longtemps en Suisse. Ainsi, c’est seulement en 2010, suite à un postulat de notre camarade Stéphane Rossini que la pauvreté a fait pour la première fois l’objet d’un rapport au Parlement. Et il a fallu attendre l’année dernière, 2020, pour qu’enfin, après plusieurs refus, les deux chambres au Parlement donnent mandat au Conseil Fédéral de mettre sur pied un monitoring sur la pauvreté que nous avions demandé à plusieurs reprises. C’est pourtant une évidence car comment combattre un phénomène si on ne le connaît pas…. Si le rapport de 2010 relevait quelques causes (niveau de formation, structure familiale, etc) pas un mot n’y figurait sur les bas salaires par exemple. Ce qui est étonnant lorsque l’on connaît les chiffres des travailleurs et travailleuses pauvres dans notre pays (155’000 en 2019).
En 2019, 8,7 % de la population vivaient dans la pauvreté et 12,2 % peinaient à joindre les deux bouts. Ces chiffres ne prennent pas en compte l’impact du Covid-19. Nous ne le savons que trop bien, la crise du coronavirus n’a fait qu’exacerber la situation de précarités de bien des personnes dans notre pays
Non seulement la pauvreté est « tabouisée », mais elle est en plus stigmatisée quand elle n’est pas criminalisée. J’en veux pour preuve toute la pression mise depuis des années sur l’aide sociale, à telle point que certaines études estiment à plus de 36% les ayants-droit qui ne demanderait pas cette aide.
Plusieurs facteurs expliquent ce phénomène :
- Avec les révisions de la loi sur les étrangers et l’intégration (LEI), les personnes au bénéfice d’un permis B ou C verraient leur permis annulé en cas d’aide sociale prolongée. Cela a évidemment un effet dissuasif avec des conséquences graves, provoquant une précarisation encore plus grande pour ces personnes (endettement, surendettement, etc…) ;
- Les réserves consenties, beaucoup trop petites (!) pour y avoir droit sont à mon sens un facteur de paupérisation et de renoncement. Chaque canton peut adapter le montant des réserves consenties. Pourtant pourquoi attendre que la situation de la personne se dégrade fortement pour pouvoir obtenir cette aide ? Une aide financière avant la catastrophe aiderait bien plus les personnes concernées et éviterait là aussi la spirale de l’endettement et surendettement ;
- Le remboursement dans certains cas de cette aide ;
- La stigmatisation sociétale ou politique des personnes ayant droit à l’aide sociale est bien sûr un autre paramètre. Les discours sur les abus et la soi-disant fainéantise des personnes concernées est évidemment dissuasive !
Paradoxalement, l’aide sociale qui devrait être un instrument pour soutenir les personnes en précarité est devenue une arme de paupérisation pour plusieurs d’entre elles.
C’est pourquoi le Parti socialiste a lancé la campagne « la pauvreté n’est pas un crime » et a déposé des initiatives au Parlement :
- Celle de Samira Marti qui a passé la rampe de la commission des institutions politiques du national ! (la balle est dans le camp de la commission des Etats maintenant)
- Et celle que j’ai déposé lors de cette session de juin :
Et bien que l’aide sociale soit de compétence cantonale et/ou communale, la Confédération doit d’une part veiller à ce que ces derniers respectent la Constitution et d’autre part veiller au respect des personnes pauvres. Parce que la pauvreté n’est pas un crime.