J’avais déposé une motion demandant au Conseil fédéral de modifier la loi fédérale sur l’égalité en vue de prévoir une obligation d’avoir un bureau de l’égalité entre femmes et hommes dans chaque canton ou une structure intercantonale pour les petits cantons.
Dans tous les cantons romands, il existe depuis des années des bureaux de l’égalité qui s’occupent des problématiques telles que :
- La promotion de l’égalité dans la vie professionnelle et dans la formation.
- Des conseils spécialisés pour les services publics et les cantons.
- Une aide financière aux associations spécialisées qui promeuvent l’égalité et luttent contre les violences faites aux femmes.
Vingt-cinq ans après l’adoption de la loi sur l’égalité, force est de constater que l’égalité de fait est loin d’être réalisée dans notre pays.
Une part importante des Suissesses perçoivent des salaires inférieurs à ceux des hommes ce qui se répercute sur le niveau de leurs retraites ; la maternité reste un handicap pour les femmes sur le plan professionnel, le manque de crèches pèse aussi sur la carrière des femmes (parfois sur celle des hommes) ce qui a justifié le lancement d’une initiative populaire par le parti socialiste.
Plus dramatique encore, la violence faite aux femmes reste une cruelle réalité et la question des féminicides est régulièrement traitée dans les médias, signe que l’on prend enfin conscience de la gravité du phénomène.
La Suisse a ratifié plusieurs conventions internationales. D’abord, la CEDEF (Convention internationale pour l’élimination de toutes les formes de discriminations à l’égard des femmes).
En 2018, la Suisse a ratifié la Convention d’Istanbul. La Suisse doit donc remplir ses engagements en donnant les moyens de réaliser l’égalité dans les faits.
Dans notre pays, la promotion de l’égalité est très fragmentée et cela crée des inégalités de traitement entre les régions.
Dans sa réponse à ma motion, le Conseil fédéral a prétendu attacher beaucoup d’importance à la promotion de l’égalité à tous les échelons de l’Etat mais se déclare « incompétent » pour légiférer.
Le problème est qu’il fait découler l’obligation d’une structure de promotion de l’égalité de la CEDEF au lieu d’utiliser l’art 8 de la Constitution ! Il est incompréhensible de se déresponsabiliser en invoquant le droit international. En raison de cette position, des citoyens et des citoyennes doivent envoyer leur canton devant les tribunaux pour qu’ils respectent leurs obligations. Ainsi, par deux fois, le Tribunal fédéral a désavoué le canton de Zoug : en 2011 quand il a supprimé la commission égalité, et en 2017 quand il a supprimé le poste de délégué à l’égalité. Toutefois, cette démarche est coûteuse, et chronophage et peut être répétitive si un Parlement cantonal continue à supprimer les structures de promotion de l’égalité.
J’estime donc que le raisonnement du Conseil est très spécieux : il a une responsabilité en regard d’une Convention internationale mais le fait de l’appliquer violerait l’autonomie des cantons. Pourtant, la CEDEF oblige les cantons à mettre en place une autorité ayant des compétences spécialisées dans le domaine de l’égalité.
Il est regrettable que le fédéralisme serve de paravent aux cantons conservateurs au détriment des droits des femmes et entraîne ainsi des inégalités de traitement entre les régions.
Puisque pour l’instant l’échelon fédéral est bouché, il faut poursuivre les efforts pour que tous les cantons prennent leurs responsabilités en matière d’égalité.