Des coûts en constante augmentation
En Suisse, les primes de l’assurance-maladie et la participation aux coûts des patient-e-s ont plus que doublé au cours des 20 dernières années, alors que les salaires n’ont pas suivi cette évolution – ils augmentent bien moins rapidement que les coûts globaux de la santé.
Les ménages à faible ou moyen revenu dépensent plus pour leur santé que dans la plupart des autres pays européens. Leur charge financière peut s’élever à plus du double de ce qui a été promis lors de l’introduction de la loi actuelle (Selon le message du CF sur l’introduction de l’assurance-maladie obligatoire, les primes de caisse maladie n’auraient pas dû excéder 8 % du revenu des ménages).
Aujourd’hui, ce sont surtout les ménages aux revenus moyens qui doivent faire face à des charges toujours plus insupportables, lesquelles peuvent, dans certains cas, dépasser les 20 %.
Par la même occasion, la part des cantons aux réductions de primes a diminué de 10 % en cinq ans (de 2009 à 2014), et un transfert de charge vers les assuré-e-s, qui paient de plus en plus de leur poche, a lieu.
Les primes LAMal « par tête » sont iniques. Des mesures pour limiter leur poids pour les ménages sont urgentes et nécessaires. C’est la raison pour laquelle le comité directeur propose d’étudier une initiative populaire fédérale visant à limiter la charge des primes pour tous les ménages à hauteur de 10 % maximum du revenu disponible.
La santé comme service public
Sans un renforcement du système de santé publique, les inégalités d’accès à la médecine vont augmenter. Les plus faibles, les malades et les personnes âgées payeront le prix fort. Le vieillissement de la population, l’accroissement du nombre de maladies chroniques, la nécessité de coordonner le suivi des patients aux multiples pathologies, démontrent la nécessité de renforcer la santé en tant que service public capable de répondre à l’augmentation des besoins et de garantir un système de santé de qualité, accessible à toutes et à tous – aussi aux personnes démunies et vulnérables.
Les soins sont soumis à une pression croissante. Non seulement le secteur hospitalier, mais également l’ambulatoire, deviennent un marché lucratif avec le rendement pour objectif. Les investisseurs privés sont en train d’exploiter la santé comme un nouveau secteur d’activités commerciales.
« L’assurance de base devrait couvrir les soins minimums, et ensuite la médecine peut être à 25 vitesses selon le degré de confort exigé par l’assuré en relation avec le supplément de primes qu’il est prêt à payer. Le système devrait ressembler à celui mis en place pour l’assurance RC et casco véhicule qui responsabilise l’assuré. » a déclaré Antoine Hubert (Le Temps, 15.08.2016), administrateur délégué du groupe AEVIS VICTORIA SA, groupe qui investit dans la santé, le style de vie et dans les immeubles médicaux et hôtels. Antoine Hubert n’est pas le seule à le penser : comme lui, les représentants de la droite et les lobbies des assureurs au Parlement veulent introduire toujours plus de concurrence dans notre système.
Une concurrence lourde de conséquences
Sur le site internet du Swiss Medical Network, nous pouvons lire que « la révision de la Loi sur l’Assurance Maladie et le nouveau financement hospitalier vont accélérer le processus de consolidation des établissements hospitaliers en Suisse. Swiss Medical Network veut s’inscrire dans cette mutation en offrant une alternative crédible au système public de santé. ».
C’est effectivement ce qui en train de passer : en 2012, l’introduction de la loi sur le financement hospitalier a mis les hôpitaux publics et privés en concurrence, et les cliniques privées inscrites dans les listes des hôpitaux cantonaux ont accès au financement public.
Mais au lieu d’apporter les prétendues améliorations du système de santé, la santé devient une mine d’or qui coûte chère, puisque :
- Les hôpitaux publiques et privés déclenchent paradoxalement une course aux équipements de pointe et aux investissements dans les infrastructures
- Les hôpitaux réagissent parfois à la pression concurrentielle par la sélection des patient-e-s
- Les cantons qui doivent financer les hôpitaux privés ont des dépenses de plus en plus importantes, ils sont donc contraints de faire des économies : d’une part en favorisant le transfert du secteur stationnaire au secteur ambulatoire : aujourd’hui, ce dernier est financé par les primes (les cantons participent au financement uniquement dans le secteur stationnaire). De l’autre côté, en transformant les hôpitaux publics en sociétés anonymes, en les privatisant ou en externalisant aux privés les secteurs hospitaliers les plus rentable.
Mais la population veut un solide secteur hospitalier public : là où il y a eu des projets de privatisation elle les a refusés en votation populaire, comme ça a été le cas il y un moi à Zurich e l’année passée au Tessin.
Promouvoir un système solidaire
Pour maîtriser les coûts, il faut éviter la surmédicalisation, contrôler l’admission des médecins par les pouvoirs publics, règlementer les appareils de diagnostic médical coûteux, renforcer le rôle des infirmières et infirmiers tout comme celui des autres professions médicales, et introduire des modèles de remboursement et de modèles de soins qui renforcent la coopération, la coordination et la prévention.
Nous soutenons la démarche des médecins, des professionnels de la santé et des associations de consommateurs visant à lutter contre la surmédicalisation afin de s’épargner des gestes inutiles et parfois même dangereux.
Par la même occasion, il est nécessaire de mettre fin aux incitations financières qui favorisent des prestations non nécessaires et coûteuses. La révision du Tarmed est nécessaire face au blocage imposé par les partenaires tarifaires, et permettra de renforcer la médecine de famille par rapport aux médecins spécialistes, dont certains groupes sont généreusement rémunérés.
Sans des réponses concrètes, la solidarité dans l’assurance-maladie est en danger. Car la concurrence dans le système de santé enrichit certains investisseurs, entraîne une augmentation des coûts et fait exploser les primes de l’assurance-maladie.
Pour garantir une santé de qualité, plus proche de la population, plus efficace et moins coûteuse, les pouvoirs publics doivent intervenir au bon endroit pour exercer un effet régulateur.
Il faut renforcer le système de santé publique. C’est ce que nous proposons dans ce papier sur la santé.